Audition russe à Saint Montan - À vous de jouer

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Audition russe à Saint Montan

Un peu d’âme du peuple russe...

La Russie au 19è siècle est un empire immense et vieux comme un dinosaure. Alors que toute l’Europe installe la liberté (des gens et du commerce) et l’égalité, la Russie en reste au stade des paysans-esclaves (99 pour cent de la population) et des nobles qui parlent français, ne lisent pas le Russe, vont écouter de l’Opéra italien, comme si la vraie vie et la culture, c’était forcément ailleurs.

La littérature naît d’un coup, à partir de rien (citons Pouchkine, Gogol, puis Dostoïevski, Tolstoï), et la musique aussi. Enfin, ce n’est pas tout à fait vrai pour la musique. Pour tous les Russes,la Russie, c’est le peuple, c’est à dire son folklore, ses chants, sa dévotion au tsar et à l’église orthodoxe. La musique russe naît donc du chant orthodoxe mêlé au chant traditionnel et en 70 ans, elle devient une des musiques les plus modernes du monde : en 1913, le Sacre du Printemps de Stravinski, joué à Paris, sera le premier scandale d’une langue série, choquant le public bourgeois et mélomane par sa modernité.

70 ans, pour passer d’une culture arriérée à la nouveauté la plus brillante, c’est peu ! Comment ont fait ces compositeurs ?

Ils ont refusé d’apprendre la musique internationale (dominée par les allemands et les italiens) pour réinventer l’harmonie, la mélodie, le rythme, en s’inspirant de la vraie musique russe.

C’est ainsi que dans ce morceau pour ballet, du grand Tchaïkovski, l’orchestre joue avec les contretemps pour brouiller la pulsation et les repères classiques des auditeurs, comme dans ces danses populaires à 7 ou 9 temps, assez perturbantes pour nous, habitués que nous sommes à des 4 temps bien carrés. Il faut souligner deux choses avant de laisser place à l’orchestre D. La première est que ce jeu sur les contretemps brouille aussi les musiciens que nous sommes et nous fait perdre le fil une fois sur deux (espérons que vous tomberez sur le bon numéro !) La deuxième est que nous aurons l’occasion de reparler de Tchaïkovski un peu plus tard...

Pas de quatre du Lac des Cygnes de Tchaïkowski

(orchestre D)

Tchaïkovski, musicien génial selon les uns, pleurnichard selon les autres, exemple parfait de l’âme slave selon les premiers, traître à la Russie selon les deuxièmes, est un compositeur romantique qui eut beaucoup de succès dans toute l’Europe de son vivant et qui est resté au panthéon depuis, même si certains de ses collègues russes lui reprochent une musique trop italienne, des effets vocaux ou instrumentaux pas assez proches de la langue russe, de son phrasé et ses inflexions. Il est capable de créer des phrases musicales torturées et interminables, comme des mélodies simples en apparence, pas si faciles que ça à interpréter en rythme ou à rechanter. Simple comme une gamme...Simples comme des chansons enfantines...

Petrouchka n’est pas une chanson russe mais utilise notre représentation imaginaire de la Russie par ses paroles, et 4 chevaux sonne vraiment russe, par sa mélodie qui monte et descend comme... des montagnes russes !

Quatre chevaux et Pétrouchka

(éveil et Découverte de St Montan)

Après les chansons enfantines, voilà comment Tchaïkovski imagine le monde féérique qui peuple les histoires inventées par les enfants. Ca va peut-être vous rappeler des souvenirs...

Danse de la fée dragée de Tchaïkovski.

(accompagnement des élèves de Découverte de St Montan)

Voilà maintenant un des morceaux populaires de la soirée, joué par des instruments traditionnels (accordéon diatonique), qui n’existent pas en Russie, mais bon, traditionnellement, la musique populaire se fait avec ce qu’on a sous la main ! Imaginez les bras levés des femmes qui se croisent lentement sur la pointe des pieds, les robes rouges, les rubans. Les compositeurs russe vont beaucoup s’inspirer des différentes traditions russes, puisque l’Empire, qui va du Pacifique à l’Europe, contient de nombreux peuples aux danses et musiques très typées.

La danse lente des femmes, morceau traditionnel

(classe d’accordéon)

Comment qualifier cette musique russe ? Il y a d’abord un sens de la mélodie aussi développé que celui des italiens, c’est dire ! Ça monte, ça descend, ça fait vibrer les instruments et les oreilles, quelle plaisir que ces mélodies russes dans cette langue si jolie ! Il y a ensuite une manière d’harmoniser bien particulière. Que veut dire harmoniser ? En voici l’explication par l’exemple. (Chloé fait chanter l’orchestre C) . Donc il y a une manière russe de faire sonner les mélodies en choisissant des accords, des changements de tonalité. Vous verrez grâce à ce trio de Rachmaninov les deux aspects. La mélodie est d’abord exposée au piano, avec de beaux accords assez spéciaux. Ensuite, elle sera reprise par le violoncelle puis le violon, avec un lyrisme romantique, c’est à dire une manière de jouer comme si on chantait à pleine voix avec des larmes et des soupirs émouvants plain la voix. Et comme ça ne suffit pas pour émouvoir les coeurs durs que vous êtes, il y aura une deuxième mélodie encore plus touchante, puis un énervement général. Le morceau se terminera avec une marche funèbre.

Trio élégiaque de Rachmaninov

(Alice Gerbaud, Pierre Tran,

Chloé Amiel de Ménard)

Le roi de la mélodie, toutes époques et nationalités confondues, étant notre ami Tchaïkowski, les violoncellistes vont jouer une adaptation de la célèbre valse du lac des cygnes, qui semple particulièrement adapté à l’instrument : un cygne n’est-il pas un gros oiseau balourd sur la terre qui nage avec grâce et beauté ? Regardez danser nos violoncellistes...

Valse du Lac des Cygnes

(ensemble de violoncelles)

Autre mélodie de Tchaïkovski, pour le chant cette fois et écrite en français (alors que depuis la naissance de la musique russe, tous les opéras sont en russes et plus en italien, et que les Russes sont devenus fiers de leur culture et de leur langue). Une mélodie simple comme une comptine d’enfants et bâtie sur une gamme est répétée 7 fois avec quelques variantes. Au milieu, le souffle de la passion romantique s’empare des chanteurs qui deviennent terribles....

Sérénade, chanson en français de Tchaïkovski

(orchestre D)

Pour finir, une chanson traditionnelle harmonisée à 3 voix (un dicton russe dit que si on réunit 4 Russes dans une salle, ils se mettront immédiatement et en improvisant à chanter à 4 voix, toutes différentes !)

La chanson parle du bouleau, l’arbre emblématique de la steppe et Toundra sibérienne. Il symbolise l’axe du monde, évoque l’innocence. J’espère que vous saurez apprécier la douceur de la mélodie et de la langue,et le talent des chanteurs qui habillent la mélodie de couleurs russes différentes à chaque couplet.

Bérétza, chanson traditionnelle

(orchestre C)